Messagepar turmeric » 13 avr. 2019, 04:07
Boisson : je n'ai pas de verre
Musique : le jukebox est trop loin
Lieu : aucune idée, mais j'aime bien le carrelage
Mot : chocolatine
Il n'y avait pas de porte où je me trouvais, juste des tableaux accrochés aux murs, des peintures de portes, tous de styles différents, luisants comme des fenêtres donnant sur d'autres mondes. Le mot "chocolatine" ne semblait pas servir à grand chose, même en le prononçant à la Harry Potter. Pourtant, il était là, sur une table toute aussi banale. J'essayais alors de cogiter mais il n'y avait rien à faire, à part subir l'endroit. J'avançai alors vers le tableau le plus proche, le plus attirant, et je l'auscultais. On voyait la peinture, du moins les couches de coups de pinceaux, et on voyait aussi la perspective rester statique en s'en approchant. Mais cette luminosité, ce réalisme, d'où venait-il ? Est-ce magique ? Je ne pouvais pas gratter l'oeuvre, même si ça me démangeait, je grattai alors des yeux les détails mais la toile était banale en elle-même. Je fis le tour de la pièce, après une bonne heure d'analyse minutieuse, il devait y en avoir une bonne centaine. Mais alors que mon regard cherchait le premier tableau inspecté, il manquait à l'appel. En fait, je crois qu'il y en avait un autre à la place, mais je n'étais certain de rien. J'abandonnai alors l'idée de sortir d'ici, et je me mis à attendre, dans un coin.
Sans que je fasse quoi que ce soit, un tableau tomba au sol, me faisant sursauter. Je ne pus pas m'empêcher de le ramasser et de voir que la porte peinte à l'intérieur s'était ouverte. C'était comme s'il y avait un trou dans la toile, mais lorsque je regardais de dos, je voyais l'intérieur de la toile, comme si j'étais dans une bulle imaginaire et que je bougeais une ouverture dans un autre monde. Renversant ! Mais je ne pouvais pas passer, alors, comme frénétique, pris d'une intuition, je saisis le plus gros tableau dans la salle mais j'hésitais alors car sa toile n'était pas de bonne augure. Regardant tout autour de moi, il n'y avait que celui là pour tenter l'expérience. Lassé, je n'hésitai pas, lâchant le cadre au sol. En le ramassant, la porte s'était bien ouverte, et retournant la toile et en scrutant ce monde aux couleurs ternes de mes propres yeux, je pus déduire qu'il s'agissait d'une sorte de cave, celle d'une maison probablement. J'apercevais cependant un escalier mais je ne pouvais pas l'atteindre, car aller au delà de la pièce dans laquelle j'étais m'était impossible : il fallait que je passe à travers, mais pourrais-je revenir ? Je passais alors, déchirant l'ouverture initiale, rampant sur le sol poussiéreux, pris d'un grelotement pittoresque. Aucune porte derrière moi, c'était un voyage sans retour. Peu importe. Je me frottais pour me défaire des saletés, et je tendis l'oreille. De la musique ? Je connais cette musique ... je montai alors doucement les escaliers, et j'écoutais à la porte. Je n'entendais rien, à part la musique, et elle me donnait un sentiment de confiance. J'ouvris alors lentement la porte, et je reconnus alors assez rapidement le bar où je me trouvais au début. Tout ça pour ça ? Mais alors que je passais la tête, ne voyant personne, je fus terriblement choqué de me voir moi-même, près du mur, face au prospectus. Je me rappelais alors de la scène, et j'attendis un moment pour voir apparaitre celle qui m'avait surpris cette nuit là. Sauf qu'elle n'arriva jamais. Je dus me cacher pour ne pas me voir "moi-même" et réfléchir d'avantage, mais j'étais un peu sur le cul. J'ouvris alors à nouveau, me dirigeant vers moi-même comme si j'étais un fantôme. Et dans un geste presque automatique, j'étais maintenant où elle se trouvait précisément, créant la même réaction que j'avais eu. Je commençai alors à me parler à moi-même, mais très vite je compris que je n'étais pas moi, mais comme à l'intérieur d'un souvenir. Je n'avais pas vraiment toute ma liberté, et je n'étais apparemment pas moi car je ne fis pas la réflexion de ma similarité. Pourtant, la scène était différente. Je pouvais même interférer, mais je me sentais alors pris de malaise et ce que je disais m'échappait alors. A la fin, alors que j'allai sortir le mot de ma poche, je constatais alors que les mots n'étaient plus "gruyère", mais "chocolatine". Seulement, alors que j'avais l'impression d'avoir revécu la même scène, et que celle ci venait de se terminer, il y eu un long silence, comme la fin d'une cassette qui tourne, alors qu'il n'y a plus rien à diffuser. Je pus alors reprendre ma liberté d'être, mais ce ne fut absolument pas ce à quoi je m'attendais. Lorsque je me regardais, j'étais moi, et il y avait mon autre moi, du passé. Mais quand je lui demandais qui il voyait, il ne comprenait pas ce que je lui demandais. Je lui dis alors que j'étais celle qu'il voyait, mais que c'était lui, dans le futur, mais il ne comprit rien. Rien à faire, je n'insistais pas, d'ailleurs, moi-même je ne comprenais pas ce que je m'expliquais, j'étais aussi perdu que lui, mais j'avais un temps d'avance.
Seulement, impossible de m'échapper, j'étais coincé avec moi-même dans ce bar ne comprenant pas pourquoi j'étais devenu celle que j'avais rencontré et dont j'ignorais tout. Qui était cette blonde ? Pourquoi étais-je elle ? Et pourquoi pouvais-je me voir moi-même dans le passé, sans être capable de me reconnaitre, ou de comprendre ne serait-ce que le sens de tout ça ? Je regardais alors le prospectus, que je n'avais pas arraché du mur, et il était lisible cette fois. Je montrais alors le papier à mon moi, et je lui demandais ce qu'il y avait d'écrit, en vain. C'était normal, je lui expliquais alors ce que je lisais. C'était un calendrier, comme le suggérait son format et sa composition, mais les dates ne correspondaient pas au mois de Clinamen. En fait, c'était difficile de dire la date car même si tout était similaire, le début de l'année pouvait se trouver n'importe où. Mais si on se fiait à la logique, nous étions le 24 Fedrino. Nous entamâmes alors son étude superficielle, n'ayant pas de meilleure piste mais comme rattrapé par le temps, je me rendis compte que je n'étais plus que seul dans le bar, mon moi du passé ayant disparu. Retournant alors le calendrier, je notais au dos un mot presque illisible, mais en le regardant, du peu que je pouvais en lire, je ne connaissais pas son alphabet. Une voix chuchotait alors derrière moi, et je pus la reconnaitre ... c'était elle, ou moi ?, et elle disait :
myrtille